Créée en 1991 à Montpellier par Jean-Michel Germa, la Compagnie du vent a cédé 56 % de son capital à GDF-Suez en 2007 pour avoir accès à des capitaux permettant de développer des projets éoliens plus importants. Fin mai 2011, le groupe dans lequel l’État reste pourtant actionnaire à hauteur de 34 % mais ne dit rien, s’efforce de liquider une PME qui emploie 156 salariés. Au risque du chômage. Le mariage de raison, suivie d’un divorce à couteaux tirés, illustre parfaitement les méthodes des grands groupes vis à vis des PME : les attirer, prendre une participation et ensuite s’approprier à moindre frais leur savoir faire sans tenir le moindre compte de l’avenir des salariés. L’histoire commence donc en 2007 quand la Compagnie du vent se lance dans deux projets importants : la mise en place du projet éolien de Tarfaya au Maroc et celui du parc éolien off-shore des deux côtes au large de la Baie de Somme. Pour le projet de Tarfaya, la Compagnie du vent qui a répondu à l’appel d’offre du gouvernement marocain avec l’accord et l’appui de son actionnaire principal se rend compte au moment du choix par le Maroc, qu’elle se retrouve en concurrence avec une filiale anglaise que le GDF-Suez, International Power Nareva, qu’il vient de racheter. Le groupe a organisé discrètement une concurrence qui coûte une fortune à la Compagnie du vent dont tout le travail de préparation est récupéré par l’actionnaire principal. L’offre de sa filiale anglaise est plus chère mais l’autre proposition est « déclarée non conforme ». Il faut évidemment avoir l’esprit tordu pour penser que le gouvernement français a fait pression sur les Marocains pour qu’ils exercent le bon choix. Un choix qui illustre également les obstacles mis au développement international de la Compagnie du vent et à son souhait de développer la nouvelle technique qu’elle a appris à maîtriser : le solaire thermodynamique, c’est à dire des petites centrales utilisant le soleil pour produire de la chaleur et de l’électricité. Après ces premières manœuvres qui déstabilisent le travail et les finances de la Compagnie du vent, le Groupe GDF-Suez a annoncé il y a quelques semaines à cette dernière qu’elle a décidé de confier la réalisation du premier projet d’éoliennes off-shore français à une consortium réunissant Areva et Vinci. Jean-Michel Germa est prié de transmettre toutes les études préliminaires et l’intégralité du dossier qu’il a monté depuis cinq ans à ce nouveau venu. En échange d’une indemnité éventuelle de 82 millions d’euros. Il refuse en pensant à son personnel. Il ne reste plus qu’à débarquer le président de la Compagnie du vent au cours d’une assemblée générale des actionnaires qui s’est tenue vendredi dernier. Bien que la société se soit placée quelques jours plus tôt sous la protection du tribunal de commerce de Montpellier, Jean-Michel Germa est viré et remplacé par un cadre de GDF-Suez. La bataille devant les tribunaux commence. La puissance du grand groupe est si grande que l’issue de la bataille reste indécis, la Compagnie du vent réclamant une indemnité de 480 millions d’euros pour survivre sans son prédateur. En attendant, des dizaines de licenciements sont donc prévisibles dans les rangs du personnel de la Compagnie du vent ainsi que la liquidation de tous ceux qui travaillent au projet éolien off-shore, ce qui ne semble pas le moins du monde émouvoir GDF-Suez. L’essentiel lui est acquit : le savoir faire d’une petite société qui a bâti sa réputation sur l’éolien. Il y a des précédents : en 2008 la société Energia a été racheté et vidée de sa substance dans les mêmes conditions a été vidée de sa substance dans les mêmes conditions et son président viré. Au delà des méthodes de grands groupes prédateurs pillant et siphonnant les PME qui restent la force et l’une des originalités du tissu industriel français demeure un soupçon politique : les adversaires des éoliennes se recrutant largement plus dans l’électorat conservateur de la majorité, il est permis de se demander, après la loi restreignant le recours à l’éolien et au photovoltaïque, si GDF-Suez ne participe pas sur ordre à la limitation des initiatives éoliennes un an avant l’élection présidentielle. Au profit, évidemment, des projets nucléaires de Nicolas Sarkozy.
29 Mai 2011 par Claude-Marie Vadrot
source : http://blogs.mediapart.fr*
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