jeudi 14 avril 2011

Brandir un drapeau étranger, bientôt soumis à autorisation ?

Brandir un drapeau étranger, bientôt soumis à autorisation ? | Rue89

Par fxh.dechezmoi | Ancien étudiant en attente du reste... | 14/04/2011

Des drapeaux sur la façade du restaurant Les Lauriers à Belleville, Paris (Blandine Grosjean/Rue89).
Photo : des drapeaux sur la façade du restaurant Les Lauriers à Belleville, Paris (Blandine Grosjean/Rue89).

Fin 2009, plusieurs députés de la majorité avaient cosigné la proposition de loi du député UMP Elie Aboud visant à interdire les drapeaux étrangers pour « faire respecter les symboles républicains lors des célébrations de mariages se tenant dans les locaux des mairies ».
Le texte rédigé alors, malgré son magnifique exposé des motifs, n'avait pas suscité beaucoup d'engouement avant que l'idée ne soit reprise au cours des débats sur le projet de loi relatif à l'immigration, l'intégration et la nationalité.

« Réglementer l'usage d'un drapeau étranger »

Une petite pierre vient d'être ajoutée à la construction de cette idée. Des députés ne manquant pas d'imagination ont déposé le 30 mars à l'Assemblée nationale la proposition de loi du député UMP Guy Teissier visant « à réglementer l'usage d'un drapeau étranger dans l'espace public français par une déclaration préalable ».
Les auteurs de la proposition font le constat suivant :
« Un certain nombre de nos administrés, qu'ils soient français, d'origine étrangère ou pas, déploie en des occasions diverses – fêtes nationales, manifestations – ou simplement dans le quotidien, les drapeaux de leur pays d'origine. »
 Ce qui constituerait trop souvent « une démarche provocatrice à l'égard de nos principes républicains ».

« L'obligation d'une déclaration préalable »

Ils décident de réagir afin de « prévenir l'accroissement de ce type d'agissements. »
L'idée est théoriquement simple : soumettre l'utilisation des drapeaux étrangers « à l'obligation d'une déclaration préalable » auprès de la préfecture – dont les modalités figureront dans un décret si la loi est votée – un peu comme celle concernant l'organisation d'une manifestation sur la voie publique.
Le représentant de l'Etat pourrait ainsi prononcer une interdiction « lorsque cet usage s'inscrit dans une volonté délibérée de provocation aux principes républicains. »

De la difficulté de soutenir une équipe de foot étrangère

Penchons-nous sur le cas de mon ami. Il est de nationalité française et certains membres de sa famille vivent en Italie. A l'occasion de grandes rencontres sportives, lorsqu'il s'agit de prendre fait et cause pour une seule équipe, il hésite souvent.
Solution assez sympathique, au coup de sifflet final, il peut laisser éclater sa joie et fêter l'événement en sortant le drapeau qui convient pour l'occasion.
Si le texte proposé entre un jour en vigueur, tout cela sera sans doute un peu plus compliqué lorsqu'il voudra se parer en vert, blanc et rouge.
Il aura dû au préalable trouver l'adresse de la préfecture, s'y rendre, faire la queue pour déposer sa déclaration, attendre la réponse ! Et cela à chaque fois que naîtra la volonté d'utiliser un drapeau étranger.
D'ailleurs, à ce sujet, j'aimerais bien que l'on m'explique comment, simplement avec les quelques informations contenues dans la déclaration, les services de la préfecture pourront déceler « une volonté délibérée de provocation aux principes républicains. »
Mais cela n'est qu'un détail me direz-vous, un tout petit détail.

Le risque d'une contravention de cinquième classe

Et pour donner une apparence d'efficacité à leur proposition, les auteurs n'oublient pas de prévoir le côté répressif en sanctionnant d'une contravention de cinquième classe (passible de 1 500 euros d'amende) le fait d'avoir utilisé un « drapeau dans l'espace public français » en l'absence de la fameuse déclaration préalable ou si une interdiction avait été préalablement prononcée ou encore en cas de « déclaration incomplète ou inexacte de nature à tromper sur l'objet et les conditions de l'utilisation projetée. »
Notons que, dans le premier alinéa, il est fait référence au « drapeau » sans autre précision alors que le second mentionne le « drapeau étranger ». Il s'agit sans doute une petite erreur de plume qu'il conviendra de rectifier.
Voilà un texte qui n'aura sans doute, en tant que tel, que peu d'avenir et mais qui a le mérite de montrer que la même idée est toujours présente. Qui sait jusqu'où elle fera son chemin ?

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